12.07.2016

Les bases de la photo astronomique

Rédigé par:
Franky Giannilivigni

12.07.2016

Les bases de la photo astronomique

Quand on lève les yeux au ciel par une belle soirée dégagée d’été, on peut admirer la voûte céleste et ses magnifiques étoiles.

Il est sûr qu’en tant que passionné de la photo, vous vous êtes un jour fait la réflexion que ce serait sympa de pouvoir photographier ces étoiles et vous vous êtes certainement demandé comment s’y prendre.

Nous allons voir ça ensemble, mais avant de commencer il faut garder à l’esprit que comme pour toute spécialité le meilleur moyen de progresser est de bien connaitre son sujet.

Ainsi, pour devenir un meilleur photographe astronomique il est plus que conseiller de s’intéresser à l’astronomie de base.

Cela n’a rien d’obligatoire, mais ce sera un vrai plus, comme savoir reconnaitre les principales constellations, savoir comment fonctionne le ciel … etc.

C’est un plus non négligeable et parfois même bien sympathique lorsque vous observerez le ciel juste pour le plaisir seul ou avec des amis.

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La photo astronomique :

La photo astronomique, contrairement à ce que l’on peut penser n’est pas uniquement de la photo de ciel étoilé.

En fait, c’est plus large que ça, c’est la photo de tous les astres que l’on peut trouver dans notre ciel, ce qui sous-entend que parfois, sans le savoir vous faites de la photo astronomique.

Hé oui ! Cette photo de coucher de soleil est bien de la photo astronomique, car notre soleil est un astre et plus particulièrement une étoile.

Nous pouvons séparer la photo astronomique en grand thème, même si proposé ainsi, cela reste un « raccourci » pour les puristes :

  • La photo des grands astres (soleil/lune)
  • La photo grand champ
  • Le ciel profond et photo de planètes

Si je vais vous parler de ses trois grands thèmes, nous allons aujourd’hui nous concentrer sur les photos grand champs, ceci pour plusieurs raisons que je vous donnerais plus loin dans l’article.

Mais avant d’entrer dans le vif du sujet, il nous faut parler du …

Mouvement apparent du ciel :

Vous n’êtes pas sans savoir que notre bonne vieille planète bleue n’est pas un point fixe dans l’univers, bien au contraire.

Elle tourne sur elle-même et tourne aussi autour de notre soleil, qui lui-même est en mouvement.

En bref, tout bouge et de notre point de vue, on a l’impression que c’est le ciel qui bouge.

Ce mouvement a une conséquence concrète, quand on vise un objet dans le ciel, celui-ci va se déplacer.

Si on met de côté les photos spécifiques les photos « astro » sont faites de nuits et comme nous le verrons plus bas, ce ciel qui bouge peut parfois nous poser quelques petits problèmes que nous allons surmonter, ne vous en faites pas !

Qualité du ciel :

Un des points vraiment très importants en photo « astro », c’est la qualité de votre ciel et cette qualité va dépendre de plusieurs points.

Le premier et le plus difficile est la pollution lumineuse. Si vous vous trouvez dans une région fortement impactée par cette pollution, vos photos vont prendre une teinte orangée du plus mauvais effet et bien entendu cela va également occulter certaines étoiles « faibles ».

On peut connaitre la qualité de son ciel grâce à des cartes spécifiques que vous pouvez consulter en Cliquant ICI.

Le deuxième point est la lune, en effet, quand celle-ci est pleine elle émet beaucoup de lumière et de fait, va également occulter une partie des étoiles les plus faibles. Il est donc conseillé de faire ses photos lors des phases de nouvelle lune plus propice à l’astronomie.

Le dernier point étant bien entendu la météo, il faut un ciel particulièrement beau pour faire de belles photos, donc, il faut croiser les doigts pour que notre sortie « astro » soit planifiée un jour particulièrement propice d’un point de vue météo.

Photo du soleil et de la lune :

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ATTENTION ! Photographier le soleil n’est pas quelque chose d’anodin, il faut vraiment, vraiment faire très attention.

En effet, le soleil est un astre puissant, on peut voir les brûlures qu’il est capable de nous laisser l’été, nos yeux n’étant pas sensible à la douleur nous n’avons aucune alerte pour se rendre compte du danger.

Ainsi, fixer le soleil avec votre appareil photo peut tout simplement vous rendre aveugle, et ceci de manière définitive sans la moindre alerte de douleur pour vous mettre en garde.

Il ne faut tout de même pas devenir « paranoïaque », une photo comme celle ci-dessous n’est pas risquée :

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Mais il faut clairement éviter de pointer son objectif en direction du soleil et de le regarder fixement.

Pour ce qui est des photos de la lune, ce n’est pas très compliqué, la lune étant un astre très brillant, il suffit de pointer dessus le plus grand objectif que vous avez, et vous verrez que si vous faite une mesure spot, la vitesse d’obturation sera assez rapide et ceci même dans des valeurs ISO basses.

Si vous voulez intégrer la lune dans un décor, celle-ci aura d’ailleurs tendance à ressortir surexposée ne laissant plus apparaître de détails.

Le ciel profond et photo de planète :

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La photo de ce chapitre est M63, aussi appelée « La Galaxie du Tournesol », c’est un petit objet du ciel profond, impossible à voir à l’œil nu et très difficile à photographier.

Comme je l’ai dit un peu avant, je ne vais pas entrer dans les détails de cette spécialité. En effet, pour pratiquer ce type de photo il faut de bonnes connaissances et du matériel spécifique – la plupart de ce type de photo étant prise avec un télescope ou une longue focale placée sur une « monture » spéciale dont je vous donnerais plus de détails plus bas -, mais je vais essayer de vous décrire au mieux comment on s’y prend pour obtenir de telles photos.

Premièrement, la chose qu’il faut garder à l’esprit c’est que le ciel « bouge », pour compenser ce mouvement apparent, on fait ce qu’on appelle un suivi. En gros, la monture du télescope (le trépied) suit le mouvement apparent du ciel grâce à un moteur qui lui permet de tourner. Pour que ce suivi soit parfait et que le champ visé ne tourne pas sur lui-même (ce qui donnerait une rotation différente de l’objet photographié sur chaque image, car oui il faut plusieurs images pour faire une seule photo), il faut être munie d’une monture dite « équatoriale »!

Les objets de ciel profond ont besoin de long temps de pose, par exemple, la photo ci-dessous, a nécessité 1h50 de poses cumulées (je reviendrais sur le cumul plus bas) Malheureusement, la moindre erreur de suivi va avoir des conséquences, et on va perdre de la netteté. Les étoiles ne seront plus rondes.

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Comme la mécanique d’une monture (si chère soit-elle) n’est pas fiable à 100%, si on veut une photo parfaite, on fait ce qu’on appelle de la « correction de suivi ». Pour cela on met sur notre premier télescope un deuxième bien plus petit munie d’une webcam. Le « petit télescope » (ou lunette) est pointé sur une étoile qui va nous servir de point de référence. La webcam est branchée à un ordinateur portable ou tourne un programme qui calcule les mouvements apparents de l’étoile et envoie l’info de correction au moteur de la monture dès que celle-ci se déplace, pour avoir un suivi parfait.

On peut se passer de cette correction de suivi assisté par ordinateur en le faisant « à la main », mais c’est long et fastidieux, l’assistance de l’ordinateur reste un confort non négligeable.

Ensuite (sans parler des différents appareils) il y a deux moyens de prendre des photos du ciel profond :

  1. En parallèle du télescope. C’est-à-dire qu’un appareil photo et son objectif sont montés sur le télescope (mais ne regarde pas à travers lui) et utilisent celui-ci comme simple support (pour profiter du fameux suivi)
  2. Photographier au foyer. Ce qui veut dire qu’à l’aide d’une bague T2 et d’un adaptateur pour son appareil (qui change selon la marque) on utilise le télescope comme un objectif.

Pour ma photo de M45 j’étais en parallèle. J’ai donc utilisé mon 400mm f/2,8 et mon télescope comme simple monture pour le suivie.

M45 est un très grand objet de ciel profond. C’est un amas ouvert d’étoiles qui s’étend sur 2°, soit l’équivalent de 4 fois le diamètre apparent de la Lune.

Plusieurs étoiles de cet amas sont visible à l’œil nu, on ne verra malheureusement pas la nébuleuse, qui même avec un télescope bien lumineux reste difficile à distinguer.

Il n’y a qu’en photographiant M45 qu’on peut la voir !

En photo « astro » on ne va pas faire 1h de pose d’un coup. Comme vous vous en doutez, le bruit numérique serait tout simplement énorme et ingérable.

On a découvert que 10x120s de poses compilées ensemble donnaient le même résultat qu’une seule fois 20 minutes.

Par exemple pour ma photo de M45 j’ai fait 22x300s.

Attention tout de même, il faut que la force du signal soit suffisante, ce qui veut dire que 10 fois une seconde de pose ne vont pas donné l’équivalent de 10 seconde, car le ciel n’émettra pas assez de lumière, donc un signal assez fort, pour que celui-ci puisse toucher le capteur.

On prend aussi des Dark (même temps de pose et même ouverture qu’un cliché normal, mais avec le capuchon sur l’objectif ou le télescope pour ne prendre que du noir) on prend également des offsets (exactement comme un Dark, sauf que la vitesse d’obturation doit être la plus rapide possible) et pour finir des Flat, soit des images sur fond blanc exposées de façon uniforme.

On prend donc (dans mon cas) les 22 photos de M45, les dark et les offsets. On met le tout dans Iris (…ce n’est pas si simple, mais on résume) et ce programme, gratuit et extraordinaire, qui est spécialisé pour la photo astronomique, va compiler les photos, se servir des Dark et des offsets pour enlever le bruit numérique dû aux longues poses et aussi dû au bruit natif du capteur, le flat quant à lui est là pour corriger le vignetage et autre petite poussière.

Quand c’est fini on peaufine les détails avec Photoshop….et après des heures de travail avant, pendant et après, on arrive à ce genre de résultat.

La photo de grands champs :

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Pour débuter en photo astronomique, la photo de grands champs est ce qu’il y a de plus simple et permet de très sympathiques résultats.

Comme pour tout, plus on pratique, plus il est aisé d’obtenir de belles images.

À nouveau, il faut garder en tête que le ciel « bouge », je sais que cette information est un peu redondante dans cet article, mais il est capital de s’en souvenir.

Le fait que les étoiles du ciel bougent peut être une force, dans le cas d’une photo circumpolaire (voir l’illustration ci-dessous), comme une petite difficulté à surmonter, mais quand on comprend le principe, il n’y a plus de problème.

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Nous n’allons pas entrer dans les détails de la photo circumpolaire, car il y aura peut-être dans de prochaines publications un article dédié à ce type d’image. Il faut juste savoir que dans le principe c’est une pose longue qui permet de dessiner la trainée d’étoiles.

Il faut connaître quelques petites astuces pour mettre ça en œuvre, ce qui est un peu long à expliquer dans ce billet, qui est déjà bien conséquent.

Nous allons donc voir comment faire du grand champ, qui reste le type d’image astronomique la plus simple à mettre en œuvre.

Le matériel nécessaire est plus que simple :

  • Un boîtier reflex ou hybride sont recommandés (pour leur capacité à monter en ISO).
  • Un objectif entre 8mm et 50mm, avec la plus grande ouverture possible (mais l’objectif de base convient parfaitement).
  • Un bon trépied bien stable comme le Manfrotto BeFree, qui a l’avantage d’être compact, léger (donc facilement transportable), solide et stable.
  • Et si possible, mais pas obligatoire, une télécommande ou un intervallomètre ou un appareil photo que l’on peut commander avec le WiFi

Une fois que l’on a tous ces éléments, que l’on a choisi le jour et le lieu idéal, on peut aller faire notre photo.

On a plusieurs choix d’image, de la constellation (comme la grande ourse) au paysage avec la Voie lactée …etc.

Pour autant, à vos débuts je commencerais avec du paysage avec le plus grand-angle possible, ce qui sera plus simple pour vous faire la main, le grand-angle offrant plus de latitude d’erreur.

N’oubliez pas que c’est une photo et elle devra donc être composée avec soin, par exemple des silhouettes d’arbre comme la photo ci-dessous peuvent donner de la force à votre image :

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Installer votre matériel, trépied, appareil photo, quand c’est fait, nous allons devoir surmonter la première difficulté, celle de la mise au point.

En effet, bien que les étoiles soient des objets très lointain et que la logique voudrait qu’on place la mise au point sur l’infini, il faut savoir que l’infini sur un objectif varie, et ceci afin de permettre au fut de se rétracter ou de se dilater selon la température ambiante.

Le meilleur moyen de faire la mise au point est donc de viser un objet lumineux se trouvant loin de l’appareil (une quinzaine de mètres), comme une lampe de poche, les phares de votre voiture, les lumières de la ville … etc. Une fois la mise au point faite sur l’infini, passez en manuel pour verrouiller cette mise au point. À partir de là, éviter de toucher à la bague de mise au point.

Cette étape étant faite, vous pouvez maintenant chercher le meilleur cadrage possible pour votre photo.

Il est impératif de faire toutes vos photos en RAW, si vous voulez pouvoir en tirer le meilleur en post-traitement.

Passé en mode M, mettez une valeur ISO élevée qui préservera la qualité de vos fichiers, je ne peux pas vous donner de valeurs idéales, car cela dépend beaucoup de l’appareil que vous utilisez, mais en règle générale il est déconseillé de dépasser les 3’600 ISO, sauf appareil très performant.

Pour l’ouverture, il faut simplement mettre le chiffre le plus petit, si c’est f/3,5 alors réglez-la sur f/3,5, si c’est 2,8 sur 2,8, je pense que vous avez compris le principe, le but étant de permettre à un maximum de lumière de toucher le capteur.

Pour la vitesse d’obturation, il va falloir que l’on tienne compte du fameux mouvement apparent du ciel afin de ne pas faire une pose trop longue, qui risquerait de déformer les étoiles.

Pour ce faire, il existe une astuce très efficace, la règle des 500, qui utilise simplement la formule suivante :

500/longueur focale = temps de pose max en seconde

Pour comprendre, voici un exemple, avec un objectif de 24mm, on fera 500/24 = 20,83, soit une pose maximum de 21 secondes, attention, ce temps est à divisé par 1,6 si vous avez un APS-C pour tenir compte du crop-factor.

Si la pose doit être de moins de 30s, régler le temps de pose directement sur le boîtier. Si le temps de pose peut être supérieur à 30s et que vous avez de quoi piloter votre appareil, avec une télécommande, un intervallomètre ou la connexion WiFi, alors réglez ce temps de pose, sinon, contentez-vous de trente secondes.

N’hésitez pas à faire varier les réglages ISO et les temps de pose pour essayer d’obtenir le meilleur.

Ensuite, il y a de petites astuces pour « éclairer » ses premiers plans, comme une lampe de poche, c’est ainsi que j’ai apporté de la lumière sur l’image d’illustration de cet article.

J’ai aussi tiré profit de la pollution lumineuse, l’orange que l’on voit dans le fond n’est pas un levé de soleil, mais bel et bien les lumières de la ville se reflétant dans les nuages bas.

Pour ce qui est du post-traitement, un programme comme Lightroom sera suffisant pour tirer le meilleur de vos images.

Si vous attrapez le virus de la photo astronomique, très vite vous trouverez des tutoriels plus poussés pour vous apprendre des traitements et techniques d’image, qui vous permettront de progresser.

De mon côté, je voulais vous aider à faire vos premiers pas dans cette merveilleuse discipline.

L’astrophotographie est un sujet très complet, vraiment vaste et on pourrait écrire plusieurs livres sur le sujet, ce billet ne se veut pas exhaustif, il est juste là pour vous inviter à débuter en vous montrant que ce n’est pas si compliqué que ça.

 

Franky Giannilivigni

Suisse

Photographe professionnel Suisse et formateur photo reconnu par les plus grandes marques, tel que Canon, Nikon, PhaseOne, il lui arrive d’écrire des livres sur la photo et il anime également l’un des plus grands blogs photo francophones d’Europe, le Darth’s Blog, sur lequel on trouve bons nombres de conseils, tests, concours et autres passionnants billets sur photo. En un mot, c’est un passionné et amoureux de la photo.

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